Dans le cadre de son exposition « Caricature au cœur de la ville », nous avons rencontré Palito, un artiste dont le travail, à la fois ludique et engagé, interroge notre rapport à l’enfance et à l’art. Dans cette interview, il nous parle de son parcours, de son approche artistique, de sa volonté de mettre en avant d’autres artistes du street art, et de ses futurs projets. Il évoque également une installation marquante, mettant en lumière les enjeux écologiques contemporains. Plongeons dans l’univers créatif de Palito.
C’est qui Palito ?
Palito : Palito, ce n’est pas un artiste au sens classique du terme. Le dessin, pour moi, est une nécessité, une forme d’expression qui s’impose quand j’ai quelque chose à dire. Ce n’est pas une démarche artistique au sens où l’on chercherait à faire du beau ou à atteindre une forme d’esthétique. J’ai toujours dessiné pour exprimer une idée, un ressenti, sans me soucier de l’aspect esthétique. Le dessin est simplement le moyen le plus accessible et naturel pour moi de partager une vision, et je pense que c’est quelque chose d’universel : on a tous, à un moment ou un autre, pris un crayon pour dessiner. Mon intention n’a jamais été de créer quelque chose de « beau », mais plutôt de rendre visible ce qui me traverse, de manière spontanée et directe.
Comment tu résumes ton travail ?
Palito : Mon travail, c’est avant tout une exploration de l’enfance et de l’imaginaire, avec des dessins qui renvoient à ces histoires et mythes qui ont marqué notre jeunesse, comme le loup, l’ogre, ou le petit chaperon rouge. Ces contes ne sont pas seulement des récits pour enfants, ils laissent une empreinte profonde sur notre vie d’adulte en façonnant notre façon de voir le monde. Par exemple, le mythe du loup dans le Petit Chaperon Rouge, nous apprend à rester méfiants face aux inconnus. À travers mes dessins, je voulais raviver ces personnages et ces leçons, en les réinterprétant dans un contexte moderne.
Finalement, les personnages que je dessine sont aussi des caricatures de personnes que j’ai rencontrées dans ma vie. Chacun d’entre eux représente un trait de caractère, une facette que j’ai observée chez quelqu’un. En ce sens, nous sommes tous des caricatures de nous-mêmes, jouant des rôles qui rappellent les héros et les méchants de nos contes d’enfance. Mon art, c’est donc à la fois un retour à ces histoires qui ont bercé notre enfance, et une réflexion sur la manière dont elles continuent de nous influencer aujourd’hui.
Il y a des œuvres d’autres artistes dans cette exposition, pourquoi ?
Palito : Mon objectif est de rendre le street art accessible au-delà des frontières parisiennes, notamment en banlieue. Depuis des années, j’ai pu constituer une collection d’œuvres de street artistes que j’ai récupérées de différentes manières : certaines m’ont été offertes, d’autres, je les ai achetées ou même arrachées à la rue. Pour cette exposition, j’ai rassemblé des œuvres de Fred Le Chevalier, Bilel Allem, Bendos, Berthet One, LIOX, et Oliver, entre autres. Ce qui relie tous ces artistes, malgré leurs styles variés, c’est la caricature, un point commun dans leurs créations qui permet de donner vie à des personnages marquants.
Mon but est de continuer à faire vivre l’esprit du street art, surtout en dehors des limites du périphérique, où il est encore rare. C’est pourquoi je tiens à saluer Space Invader, qui a offert une de ses œuvres sur une des colonnes de la passerelle de Villeneuve-Saint-Georges. C’est un geste significatif, et je milite pour que cette œuvre soit protégée si jamais une démolition est envisagée, car beaucoup d’œuvres de street art sont vouées à disparaître. Elles finissent souvent dans des collections privées ou en galerie, loin de leur contexte d’origine, et disparaissent ainsi de notre quotidien. Mon intention avec cette exposition est de préserver cette forme d’art et de la partager avec un public plus large, tout en gardant vivante sa nature éphémère et rebelle.
Cette baleine, vous pouvez nous en parler ?
Palito : Oui, cette installation attire beaucoup d’attention ! Il s’agit d’une œuvre d’Olivier qui s’intéresse aux enjeux du réchauffement climatique. La baleine fait écho à l’actualité, notamment à l’incarcération du capitaine Paul Watson, le fondateur de l’ONG Sea Shepherd, connu pour ses actions de défense des océans. Alors, j’ai joué les pirates : j’ai récupéré cette baleine dans son environnement « naturel » à Paris, où elle était installée dans une bouche d’aération du métro, et je l’ai amenée ici, à Villeneuve-Saint-Georges, pour que tout le monde puisse la voir et se poser la question de sa présence.
Les baleines à bosse voyagent sur de longues distances, de l’Antarctique à l’équateur. J’ai voulu faire voyager celle-ci du 8e arrondissement de Paris jusqu’à Villeneuve, pour rappeler que la question écologique et le bien-être animal nous concernent tous, au-delà des clichés. Ce n’est pas juste une affaire de « bobos » parisiens, c’est une préoccupation universelle à laquelle nous devons tous être sensibles.
Où pourra-t-on vous retrouver prochainement ?
Palito : Je ne sais pas encore précisément. J’aime bien laisser une part d’incertitude dans mes projets. Mais je réfléchis sérieusement à la publication d’un ouvrage qui rassemblerait mes œuvres et mes réflexions sur le street art. Affaire à suivre, donc… Gardez l’œil ouvert, il pourrait y avoir des surprises bientôt. Et puis, je voulais remercie Isabelle, Nordim et la ville de Villeneuve-Saint-Georges pour leur engagement et qui m’ont fait confiance sur cette exposition qui sort des chantiers battus.